PENDU A LA TERRE

Parodier le suicide est déjà la synthèse du sérieux que nos concitoyens accordent de nos jours aux choses qui s’écrasent à coté d’eux.

Entendons par « chose », « le malheur de chose », de « bidule », de  » l’autre là bas ». Tu sais, le type. Là. Celui qu’avait 100 vaches et 15 hectares.

Y’s’est foutu sous son tracteur, pour finir de se labourer, se planter dans la terre.

Parodier pour alerter.

Faire sourire alors que la terre se mélange au sang et à la poudre.

C’est dire l’impuissance de l’esprit et l’abandon des nourrissants.

Les « sachants » de la terre ne sont pas justement considérés.

La FRANCE, pays de terroirs, coiffée du béret et la baguette en étendart,

…La baguette…!…tu peux t’asseoir dessus connard !

Prends une flûte, tu devrais doubler tes émotions…

L’agriculteur se meurt.

Depuis si longtemps qu’il l’apprend à l’école.

Tirer au fusil ou sauter à la corde font partie du savoir faire,

Au cas où, pour ne faire plus qu’un avec son outil, la terre,

Pour rester discret, avant que la langue ne fourche, pour savoir ne plus être,

Les gens qui se baissent, poussent et soulèvent sont libres… oui, libres de s’en mettre une dans la tête,

Parce qu ‘il faut faire vivre les chiffres,

Les statistiques, ça se respecte,

Les infléchir est fatiguant pour les sans gants,

Compter est plus facile que réduire,

Comme la vie est bien faite, la terre et la mer offrent,

Et ceux qui les travaillent souffrent,

Assez de cadeaux comme ça, profitez déjà de la magie de la nature,

Ne venez pas noircir tout ça avec le sale argent,

Point besoin de maisons de marbre et de voitures en verre,

ça, c’est fait pour les gens bien élevés,

Le grand air, c’est déjà bien payé !

Privilégiés !…

(………………..)

….Ce champ est juste l’aire du temps,

Il est préférable de « pousser des citrouilles » à 22 avec des crampons plutôt que de les faire pousser seul en bottes.

L’agriculteur se meurt.

Alors qu’il nous fait manger.

Et si je m’en remet à la chaîne alimentaire…

LA VESSIE PLEINE

Se soulager.

Du manque de dignité de l’Homme sur cette planète.

Pauvre de son éphémérité, il se venge de son éternité en la consommant comme un porc, comme une bête,

Un tirant sur la couverture pour en élever une plus épaisse que celle de ses voisins.

Porc parmi les porcs, je regarde mes mains,

Avec elles, je force l’image et l’écriture. J’anoblie mon l’existence.

Je l’adoucie. Lui redonne un sens.

En montrant et en partageant.

Et quand bien même ces mots et ces couleurs n’atteindraient personne, alors, je m’apaise doucement.

En laissant s’écouler l’énergie dans l’encre.

Avec elle, les mots pacifistes en guerre et dans le ventre.

COEUR EN BRONZE

L’amour est un sentiment dont la définition n’appartient à personne.

Mais que chacun emprisonne dans ses membres et des organes.

En espérant toucher le Graal.

L’unique.

Le  » fait pour moi ».

La fortune du cœur.

Pour être milliardaire de l’âme.

Ces très riches là sont rares.

A bien y réfléchir, ils n’existent pas.

Le milliard n’est qu’une unité d’argent.

PLUME AU CUL, PLUMEAU CUIT.

…Le monde de l’encre, l’encre-deux-mondes, est un refuge autorisé. La plume posée, il laisse en paix. Chacun et chacune.

LA PLUME.

La plume glisse, en goutte à goutte, en perfusion, en mots de pas tous les jours, en encre marine , en filet d’en-sang-ble.

Emmurée d’une bulle transparente, elle coule sur ces parois rondes. De limites, elle n’en a que l’idée et ne les voit pas.

Elle se promène sur ces toiles d’argent. Elle tourne et se laisse décrocher, glisser. S’accroche dans les montées. Zigzague pour y arriver puis redescend pour jouer avec les mots.

Les bulles s’accumulent. S’amoncellent. Elle y plonge dedans. La plume crisse. En rythme. En musique. Dans la digue des bulles…la digue don don… La digue profonde.

Ou elle s’enfonce.

De liane en liane, de liaisons en liaisons, d’accords d’accords et point de terminaison.

Point de fin. La plume a faim.

Elle s’alimente du ventre et mange les maux.

Et m’emmène là-haut, là bas. Sur la p’lune.

La main et sa plume, tous petits, tous les deux, en plis et en bosses, dans un nuage creux,

La plume grave son chemin d’ouate, le coton est son marbre,

Le vent s’est posé. La plume immobile.

L’écriture en l’air, l’air de rien, juste l’air pour respirer, se confond avec le blanc. Fissure, creuse, gratte, effiloche la brume d’haut,

Taille en rocher son enclos,

Là-haut,

La plume en marteau,

La plume en ciseaux,

En pinceaux,

Le papier en toile de m’Etre,

En bleu, en blanc, en transparent, en multimotscolore, en sang,

Qui, dans la plume et dans nos veines, pluriel de notre chance, coule en os-mots-se,

Globules rouges,

Rouge d’encre marine,

Rouge aimant des mots,

La plume tisse les peaux, tatoue les creux, éclabousse et remplit les trous,

La plume glisse, en goutte à goutte. A remplir un océan.

Concasse la prison Récurrence et son maton l’Habitude,

Elle titube, se lance en belle attitude,

Se dresse et sourit à se voir répandre,

Une encre est noire mais pas sombre,

Même hésitante, elle se sait le centre d’un monde,

Car si ne plus écrire est ne plus respirer.

Alors, casser sa plume est casser sa pipe.